CHINE & MONGOLIE : Passer la frontière en train
De retour de notre excursion dans le désert de Gobi, nous préparons le départ pour la Chine.
Visas chinois en poche depuis la France, il ne nous reste plus qu’à acheter nos billets de train. À la gare d’Oulan Bator, au 1er étage, nous tentons de nous faire comprendre… pas évident !
Des trains pour la Chine, il en passe 3 par semaine et le prochain est déjà complet. Nous prendrons le suivant, en 2nde classe pour une fois, la 3ème étant complète également.
Rencontre dans le transmogolien
À 06h15, le jeudi 22 juin, nous débarquons sur le quai, chargés comme des mules, en contemplant le train qui se trouve déjà en gare, devant nous. 23h de trajet nous attendent, dans un compartiment tout confort (rien à voir avec notre voyage en transsibérien) où nous faisons la connaissance de Clarisse.
Le hasard est incroyable, dans notre compartiment de 4 parmi les 20 wagons du train, nous partageons le voyage avec un française de 22 ans qui regagne actuellement la Nouvelle-Zélande. Elle voyage seule, est déconcertante de maturité et les heures défilent à toute allure dans les steppes et le désert de Mongolie.
Une intimité s’installe, comme à chaque fois que nous rencontrons des voyageurs, la magie opère. Un échange généreux de bons plans, de compréhension, de non-jugement et d’enthousiasme occupe tout l’espace de notre wagon en nous enrichissant au passage.
C’est ça aussi, le voyage.
Un train qui change de roues
Avec tout ça on n’oublie pas que notre train est particulier. En effet, à la frontière mongolo-chinoise, il va changer de roues (bogies) afin de pouvoir rouler sur les rails chinoises qui disposent d’un écartement différent.
Il est 21h, nous quittons la Mongolie et obtenons le tampon de sortie de la part des douaniers qui se sont invités dans le train. Puis, le train fait quelques kilomètres et se stoppe à nouveau pour laisser monter les douaniers chinois. Très rigoureux dans leur contrôle, je serai interrogée sur mon identité et mon âge, ma photo n’ayant pas convaincu l’agent suspicieux.
Un nouveau tampon sur notre passeport et nous sommes heureux comme des gosses. Ça y est, nous sommes en Chine !
De là, nous roulons jusque dans un hangar où débute une manoeuvre qui va dure plusieurs heures : le changement des bogies. Nous restons dans nos wagons, les WC sont fermés, il fait nuit et le train est désolidarisé. Les voitures sont soulevées par de gros vérins pour permettre le changement des roues, leur fixation et enfin on redescend les 2 mètres sui nous séparait du sol, en douceur.
Comme une chorégraphie bien orchestrée, on observe les opérateurs appuyer sur leurs gros boutons et les wagons d’en face qui montent et redescendent. C’est quand même bien fait tout ça, même si on se demande s’il n’aurait pas été plus rapide de nous changer tout simplement de train…
La route reprend jusqu’au petit matin où c’est l’heure pour nous de quitter la locomotive qui, elle, continuera sur Pékin.
Introduction à la culture
Il est 6h, nous arrivons en gare Jining au nord de la Chine, d’où nous prendrons un nouveau train pour Datong, notre destination.
Seuls européens dans la gare, nous sommes épiés, scrutés, comme de curieux étrangers. On sent vraiment l’insistance de ces regards, interrogateurs et amusés, sur nos têtes toutes défraîchies par une nuit saccadée. Nous montons dans notre train et commençons notre immersion avec les autres voyageurs.
Ici les sièges du train sont durs comme du béton et les passagers sont plus chargés que nous. Du riz, des sceaux, d’énormes paquets qui voyagent avec eux dans une chaleur déjà moite. On nous sourit, les enfants se retournent sur nous et déjà les 1er « hello » nous sont adressés.
C’est rigolo, sauf que ça va durer tout le trajet, des personnes se déplaçant même d’autres wagons pour vérifier la présence de ces bêtes curieuses.
Apparement, il est coutume de renifler et racler sa gorge bruyamment, pour en expulser des glaires (heureusement dans la poubelle), ou encore de manger frénétiquement un sachet entier de graines de tournesol en crachant approximativement leur coquille.
Un festival de bruits de bouche, qui serait jugé déplacé dans notre pays, mais pas ici.
Passée cette drôle d’impression, on ressent à présent celle d’être nombreux, très nombreux dans ce wagon, dans ce train, dans cette gare. Au point de tirer un trait sur notre espace personnel, cette sphère individuelle qu’on ne partage pas avec n’importe qui d’ordinaire.
C’est raté, il y a du contact, de la promiscuité, de l’intrusion pour nous qui n’avons pas l’habitude.
Il est déjà l’heure de descendre du train et de visiter notre 1ère ville en Chine : Datong.